Mission divine ou diplomatie à l’ancienne
Tandis que le Saint-Siège s’emploie en coulisses pour préparer l’après-François, le Président français semble vouloir glisser son grain de sel. Après l’Afrique, voilà que Macron rêve peut-être de s’inviter au conclave… histoire de veiller au bon choix du prochain pape. Mission divine ou diplomatie à l’ancienne ?
Linda Libaï
On le savait omniprésent, voire omnipotent, mais on ne pensait pas qu’il viserait si haut. Après avoir expertisé l’avenir de la planète au G7, conseillé l’Afrique sur sa gouvernance, Emmanuel Macron semble désormais prêt à éclairer de ses lumières… la Cité du Vatican.
La Françafrique spirituelle ?
Selon plusieurs indiscrétions révélées dans la presse italienne, l’Élysée multiplierait les signaux discrets auprès de cardinaux influents. Objectif : s’assurer qu’un futur pape, s’il venait à être élu, garderait une oreille attentive aux priorités diplomatiques françaises, notamment en Afrique. La Françafrique spirituelle ? Voilà un concept qui aurait de quoi ravir les manuels d’histoire.
Il faut dire que le calcul n’est pas dénué de logique. L’avenir du catholicisme se joue de plus en plus au Sud, et en particulier sur le continent africain, où la croissance démographique et l’expansion du christianisme vont de pair. Dans cette zone qui reste — du moins dans l’esprit de Paris — une sphère d’influence historique, placer un pape favorable aux intérêts français aurait tout d’une manœuvre à long terme. Entre stratégie géopolitique et diplomatie divine, il n’y a parfois qu’un encensoir de différence.
L'amnésie de la fille aînée de l'église
Évidemment, la France est traditionnellement la « fille aînée de l’Église », ce qui autorise sans doute quelques familiarités. Mais de là à s’improviser metteur en scène du conclave… on s’interroge.
Rappelons qu’en 1905, la France avait tout de même choisi de séparer l’Église et l’État. Manifestement, l’amnésie frappe parfois au sommet. Il est vrai qu’en matière de cohérence spirituelle, Paris n’en est plus à une contradiction près : la République a récemment inscrit le droit à l’avortement dans sa Constitution, s’apprête à légiférer sur l’euthanasie, et promeut ardemment les droits LGBT+, y compris la reconnaissance des transitions de genre et l’enseignement de ces thématiques dès l’école. Autant de positions très éloignées de la morale catholique et des enseignements du Vatican.
Linda Libaï
Correspondante pour la Suisse
Publication : 05-2025